L’équipe Biotechnologie & Biothérapie, fondée par Jacques Mallet et actuellement dirigée par Philippe Ravassard, de l’Institut du Cerveau, en collaboration avec le Pôle d’Innovation Thérapeutique en Neuropsychiatrie de l’Institut de Recherches Servier, a mis en évidence une nouvelle cible thérapeutique pour le traitement de la schizophrénie. Il s’agit d’un nouveau récepteur appelé “Gpr88″ – protéine présente à la surface des cellules – et localisé exclusivement dans le cerveau. Les chercheurs montrent que l’inactivation locale de ce “Gpr88″ permet de normaliser des comportements qui sont altérés dans un modèle de schizophrénie. Ces comportements sont réfractaires aux thérapies utilisées couramment chez l’homme. Ce travail, à l’origine de la thèse de Manuela Ingallinesi et conduit sous la direction de Rolando Meloni à l’Institut du Cerveau, représente une avancée importante dans la validation d’une nouvelle cible thérapeutique et une approche expérimentale innovatrice pour le traitement de la schizophrénie. Les résultats de cette étude viennent d’être publiés ce 26 Août 2014 dans Molecular Psychiatry l’un des journaux leaders dans le domaine de la psychiatrie.
La schizophrénie, caractérisée par des symptômes dits “positifs”, “négatifs” et “cognitifs”, est une maladie mentale grave et handicapante touchant environ 1% de la population. Les thérapies courantes de la schizophrénie utilisent essentiellement les neuroleptiques, des médicaments qui permettent de contrôler les symptômes “positifs”, comme le délire et les hallucinations, et “négatifs”, comme l’émoussement affectif et émotionnel, mais qui ne sont pas efficaces contre les déficits “cognitifs”, caractérisés par la désorganisation de la pensée. De plus, jusqu’à un tiers de patients ne répondent pas à ces thérapies. Ainsi, des nouvelles cibles thérapeutiques sont activement recherchées pour améliorer le traitement de cette maladie et particulièrement les déficits cognitifs.
“Gpr88″ est un récepteur (protéine présente à la surface des cellules) au rôle inconnu qui est présent presque exclusivement dans le Striatum, une structure cérébrale fortement impliquée dans les maladies neuropsychiatriques. L’intérêt pour Gpr88 dans l’équipe Biotechnologie et Biothérapie fait suite aux travaux de Rolando Meloni et Jacques Mallet en psychiatrie génétique qui ont montré que le gène codant pour Gpr88 est associé comme facteur de risque à la schizophrénie. Afin d’approfondir la signification biologique de cette association, Rolando Meloni et ses collaborateurs ont évalué le rôle de Gpr88 dans un modèle de schizophrénie.
Les chercheurs montrent que l’inactivation locale de cette protéine dans le Nucleus Accumbens (structure située dans la partie ventrale du Striatum dont la fonction est altérée dans la schizophrénie) réduit significativement les altérations associées au modèle de schizophrénie. Notamment, le comportement déficitaire observé dans un test de cognition sociale est rétabli à un niveau normal.
Ces résultats qui viennent d’être publiés dans la revue scientifique Molecular Psychiatry montrent que Gpr88 représente une nouvelle cible thérapeutique potentielle de grand intérêt pour le traitement de la schizophrénie. C’est pour les chercheurs de l’Institut du Cerveau un nouvel espoir pour le développement de nouveaux traitements, notamment pour la prise en charge des déficits cognitifs résistants aux médicaments couramment utilisés.
Sources
Ingallinesi et al., Local inactivation of Gpr88 in the Nucleus Accumbens attenuates behavioral deficits elicited by the neonatal administration of phencyclidine, Molecular Psychiatry (online publication, 26 August 2014)