Le contrôle de la locomotion par le système nerveux est indispensable pour adapter le comportement aux contextes environnementaux. L’équipe de Claire Wyart à l’Institut du Cerveau, en collaboration avec des équipes japonaises et norvégiennes, a utilisé la toxine botulique pour rendre sélectivement silencieux des neurones chez le poisson-zèbre. Les chercheurs révèlent ainsi qu’une population particulière de neurones est nécessaire pour initier le mouvement et contrôler la vitesse de la nage pour explorer ou fuir.
Chez tous les animaux, la locomotion est primordiale pour la survie, de la recherche de nourriture à la fuite devant un prédateur. Contrôler précisément la locomotion est indispensable pour s’adapter aux différents contextes environnementaux.
Une question cruciale concerne l’identification des populations de neurones impliquées dans ce contrôle subtil de la locomotion, en fonction des différentes vitesses de déplacement.
Pour étudier le rôle de neurones spécifiques dans le circuit locomoteur, l’équipe de Claire Wyart a mis au point une technique permettant de rendre silencieux de manière spécifique de grandes populations de neurones in vivo chez le poisson zèbre. Ce poisson est un vertébré qui partage 70 % de son patrimoine génétique avec l’Homme. En raison de sa transparence, ce petit animal est parfaitement adapté pour mettre en œuvre toutes les techniques d’imagerie et en particulier étudier la moelle épinière sans avoir à l’extraire.
Les chercheurs de l’Institut du Cerveau - ICM, en collaboration avec une équipe Japonaise, ont développé un outil génétique pour exprimer, grâce à un transgène, la toxine botulique spécifiquement dans les interneurones V2a. Les chercheurs peuvent ainsi supprimer, sans altérer les autres cellules de l’organisme, ces interneurones localisés dans le cerveau et la moelle, et projetant sur les motoneurones qui assurent la contraction musculaire pendant le mouvement. Ceci leur a permis d’observer le comportement de locomotion des larves transgéniques chez lesquelles les neurones V2a ne fonctionnent pas, soit lors de la réponse de fuite en nage rapide ou au cours de la nage spontanée.
La réponse de fuite, à la suite d’un stimulus acoustique ou lumineux, est normalement caractérisée par une augmentation de la vitesse de nage. Chez les poissons transgéniques, les chercheurs observent une diminution de cette vitesse par rapport aux poissons témoins. Les neurones V2A ont donc un rôle modulateur qui permet d’établir la vitesse appropriée à la fuite. Les expériences de comportement spontané consistent en l’observation des larves sans l’intervention d’élément extérieur. Les larves qui expriment la toxine ne bougent plus du tout, contrairement aux témoins. Les neurones V2A sont donc nécessaires pour initier le mouvement.
Ces résultats permettent de conclure que les neurones V2a jouent un rôle clé dans la locomotion, car non seulement ils contrôlent la vitesse de la nage lors de la fuite mais ils sont de plus nécessaires à l’initiation du mouvement.
L’identification précise de ces populations de neurones pourrait avoir un impact considérable sur la compréhension du fonctionnement des systèmes moteurs chez l’homme car ces neurones localisés au sein de la moelle épinière et du cerveau postérieur sont très conservés entre espèces.
Retrouvez le communiqué du CNRS sur le sujet.
Sources
Optimization of a Neurotoxin to Investigate the Contribution of Excitatory Interneurons to Speed Modulation In Vivo. Sternberg JR, Severi KE, Fidelin K, Gomez J, Ihara H, Alcheikh Y, Hubbard JM, Kawakami K, Suster M, Wyart C. Curr Biol. 2016 Aug 10.
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/27524486