Anticipation des actions : une équipe de scientifiques est parvenue pour la première fois à différencier le manque d’inhibition motrice qui entraine l’impulsivité et l’altération de l’anticipation.
Au quotidien, nous avons tous besoin d’anticiper nos actions. Sur la route par exemple, nous devons démarrer ou traverser lorsque le feu passe au vert. Pendant que le feu est rouge, notre cerveau se prépare à agir aussi vite que possible dès le changement de couleur car nous sommes « entrainés » et savons évaluer la durée pendant laquelle le feu reste au rouge.
Cependant, il arrive que nous démarrions ou traversions avant le feu vert. Ce comportement est-il de l’impulsivité ou une altération de l’anticipation ?
Une étude innovante grâce à l’enregistrement des mouvements oculaires
A l’Institut du Cerveau, Pierre POUGET, Chercheur CNRS, et Bertrand DEGOS, neurologue APHP, de l’équipe « MOV’IT : Mouvement, investigations, thérapeutique. Mouvement normal et anormal : physiopathologie et thérapeutique expérimentale » en collaboration avec Marcus MISSAL de l’institut de Neurosciences de Louvain (Belgique) ont pour la première fois, grâce à une technique innovante, pu distinguer la différence entre un manque d’inhibition motrice qui entraine l’impulsivité et une altération de l’anticipation.
Leurs travaux ont consisté à enregistrer les mouvements oculaires, ou saccades, chez 20 patients atteints de maladie de Parkinson traités ou non, et chez 18 volontaires sains.
Les mouvements oculaires sont par exemple aujourd’hui utilisés pour distinguer les patients parkinsoniens de ceux atteints de paralysie supranucléaire progressive (PSP), syndrome parkinsonien atypique, qui se caractérise par une grande lenteur des mouvements verticaux des yeux.
Bien que la maladie de Parkinson soit caractérisée par une lenteur et une réduction de l’occurrence des mouvements intentionnels, on observe parfois une impulsivité motrice accrue et une diminution de l’anticipation liée à une altération de la perception temporelle, c’est-à-dire une diminution de la capacité à estimer la durée d’un événement.
L’étude a consisté à enregistrer la vitesse et la bonne temporalité du déplacement des yeux des participants lorsqu’un point lumineux apparaissait sur un écran, toujours au même endroit.
Deux conditions ont été analysées, la 1ère alors que les participants ne savait pas à quel moment apparaitrait le signal (condition implicite) et la 2nde dans laquelle un signal d’alerte annonçait l’apparition avec plus ou moins de délai du point lumineux (condition explicite).
La maladie de Parkinson augmente l’impulsivité et diminue la capacité d’anticipation
Les résultats montrent que les patients parkinsoniens non traités présentent une impulsivité motrice supérieure aux volontaires sains et une diminution de la capacité d’anticipation. En revanche, on note une diminution de l’impulsivité et une augmentation de l’anticipation chez les patients traités par Levodopa, traitement usuel de la maladie.
Des domaines d’application au-delà de la maladie de Parkinson
Au-delà du diagnostic et du pronostic de la maladie de Parkinson, ces résultats ouvrent la voie à une meilleure compréhension et constituent un nouvel outil d’évaluation de l’impulsivité motrice dans des maladies comme le syndrome de Gilles de la Tourette mais également dans des conditions non pathologiques comme la fatigue.
Sources
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36184657/
Degos B, Pouget P, Missal M. From anticipation to impulsivity in Parkinson’s disease. NPJ Parkinsons Dis. 2022 Oct 3;8(1):125. doi: 10.1038/s41531-022-00393-w. PMID: 36184657; PMCID: PMC9527232.
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