Contrairement aux crises d’épilepsie classiques qui ne durent que quelques secondes ou minutes, « l’état de mal épileptique » correspond à une hyperactivité neuronale dans le cortex cérébral, qui persiste pendant plusieurs heures ou jours. Lorsque cet état survient sans cause rapidement identifiable chez des personnes sans antécédents neurologiques, on parle d’état de mal épileptique réfractaire de novo (ou NORSE). Cet événement redoutable expose le cerveau des patients à des dommages irréversibles. Aurélie Hanin et Vincent Navarro à l’Institut du Cerveau, en collaboration avec l’équipe de Lawrence Hirsch à l’Université de Yale aux Etats-Unis, cherchent à mettre en lumière les mécanismes physiopathologiques qui sous-tendent ces crises, pour améliorer la prise en charge des patients. Dans une nouvelle étude publiée dans la revue Annals of Neurology, les chercheurs montrent une perturbation de l’immunité chez les patients NORSE, caractérisée par l’élévation de marqueurs pro-inflammatoires dont l’intensité est corrélée avec le pronostic à court et à long terme.
Evénement rare et néanmoins redoutable dans le paysage des épilepsies, l’état de mal épileptique réfractaire de novo (ou NORSE, pour New-Onset Refractory Status Epilepticus) correspond à une crise d’épilepsie prolongée dans laquelle on observe une décharge continue de neurotransmetteurs par les neurones du foyer épileptique. Il s’agit d’une urgence médicale nécessitant une prise en charge en réanimation puisqu’il peut provoquer des séquelles neurologiques importantes à long terme – et est associé à un taux de mortalité de 12 % en moyenne chez l’enfant, et de 16 à 27 % chez l’adulte. Le NORSE peut apparaître en réaction à une infection ou au développement d’une tumeur. Mais, chez la moitié des patients concernés, l’origine du NORSE reste inconnue en dépit d’examens cliniques et biologiques approfondis.
La première étude d'ampleur sur le norse
L’identification de marqueurs pronostiques de la maladie est d’autant plus difficile qu’elle est rare et très hétérogène. Pour pallier ce manque de données, Aurélie Hanin, post-doctorante, en lien avec l’équipe de Vincent Navarro à l’Institut du Cerveau et l’équipe de Lawrence Hirsch à l’Université de Yale, a recruté une cohorte de 61 patients NORSE hospitalisés aux Etats-Unis, au Canada et à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP). Parmi eux, 51 présentaient un NORSE dit cryptogénique – chez qui la cause de l’état de mal épileptique n’a pas été retrouvée.
Les chercheurs ont évalué l’état clinique des patients à la sortie de réanimation puis après 12 mois, et cherché la présence de marqueurs inflammatoires dans le sang et le liquide céphalo-rachidien. Les mêmes données ont été collectées sur une cohorte de 37 patients présentant un état de mal épileptique de cause connue, et 52 patients contrôles.
Perspectives pour la prise en charge
Ces résultats suggèrent l’implication d’un dérèglement de l’immunité innée dans la survenue du NORSE et ses conséquences. Ils confirment également l’intérêt de stratégies thérapeutiques anti-inflammatoires dirigées spécifiquement contre une ou plusieurs cytokines chez ces patients.
De nouveaux travaux permettront de confirmer que les cytokines sont de bons biomarqueurs du NORSE – à la fois pour confirmer le diagnostic, surveiller l’évolution de l’état du patient, et estimer les capacités de récupération neurologique à la sortie de réanimation.
Financement
- Daniel Raymond Wong Neurology Research Fund (NORSE Institute, Yale)
- NORSE/FIRES Research Fund (Yale)
- Association Paratonnerre
- Fondation Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (EPIRES – Marie Laure Merchandising)
- Institut Servier
- Philippe Foundation
Sources
Hanin, A et al., Cytokines in New-Onset Refractory Status Epilepticus Predict Outcomes, Annals of Neurology, 2023. 10.1002/ana.26627
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