Le Conseil européen de la recherche (ERC – European Research Council) vient de publier la liste des bénéficiaires lauréats et lauréates de financements « Starting grants » pour l’année 2023. Les trois candidat·e·s de l’Institut du Cerveau ayant postulé à cet appel d’offres très compétitif ont obtenu ce prestigieux label.
Les bourses « ERC Starting grants » doivent permettre à des scientifiques en début de carrière de constituer ou de renforcer leur équipe de recherche autour de projets sur des sujets ambitieux et risqués, répondant à des enjeux ou verrous scientifiques innovants, encore non traités jusqu’ici. L’ERC financera ainsi sur cinq ans trois projets de recherche exploratoires coordonnée par de jeunes chercheur·e·s à l’Institut du Cerveau, aux frontières de la connaissance du développement du cerveau, du sommeil et de l’interaction cerveau-intestin.
Thomas Andrillon, chercheur post-doctorant dans l’équipe « MOV’IT : MOUVEMENT, INVESTIGATIONS, THÉRAPEUTIQUE. MOUVEMENT NORMAL ET ANORMAL : PHYSIOPATHOLOGIE ET THÉRAPEUTIQUE EXPÉRIMENTALE » a obtenu le soutien de l’ERC pour son projet « Sleeping Awake, Dormir éveillé » portant sur les intrusions locales de sommeil dans le cerveau éveillé et leurs conséquences.
Que se passe-t-il dans notre cerveau lorsque nous sommes fatigués ? La fatigue mentale peut survenir pour diverses raisons, lors de périodes d’éveil prolongées ou à la suite d’efforts cognitifs intenses.
Le sommeil et l’éveil ne sont pas des états mutuellement exclusifs. Les travaux antérieurs de Thomas Andrillon ont montré que des ondes lentes (SW) de grande amplitude, caractéristiques du sommeil, peuvent être observées localement chez les individus éveillés après avoir effectué des tâches cérébralement exigeantes ou après des périodes de privation de sommeil. Ces ondes lentes de veille ont été associées à une altération des performances cognitives comme des interruptions de l’attention.
Le projet soutenu par l’ERC vise à mieux connaitre les bases neurophysiologiques de la fatigue et à comprendre ce qu’est le sommeil local, pourquoi il se produit. Par ailleurs, les résultats de cette recherche pourraient permettre de prédire les objectifs adaptatifs du sommeil en état éveillé, de moduler sa fréquence et d’obtenir de nouvelles connaissances essentielles sur les mécanismes neuronaux qui sous-tendent le phénomène quotidien de la fatigue.
Sara Bizotto, chercheuse post-doctorante dans l’équipe « GÉNÉTIQUE ET PHYSIOPATHOLOGIE DE L’ÉPILEPSIE » a obtenu le soutien de l’ERC pour son projet « LINMOS » portant sur l’identification des processus cellulaires au cours du développement du cerveau humain.
Les organismes se développent par divisions cellulaires, générant des clones qui s’organisent progressivement pour former différents tissus. Afin de suivre les lignées cellulaires, chaque division cellulaire doit être marquée de manière permanente et unique. Très récemment, des études ont montré que les tissus humains contiennent un ensemble de marqueurs naturels sous la forme de variantes d’ADN somatique qui marquent de manière permanente et cumulative chaque division cellulaire au cours du développement. Des travaux antérieurs de Sara Bizotto ont montré que les variants somatiques sont fiables pour suivre les lignées cellulaires directement dans les tissus humains. Les projets soutenus par l’ERC visent à révéler les processus cellulaires qui forment le cerveau humain et leur dynamique, reconstruire les phylogénies cellulaires des progéniteurs neuronaux en comparant des cerveaux normaux à des cerveaux présentant des malformations corticales dues à une croissance excessive.
Dafni Hadjieconoumou, chercheuse nouvellement recrutée en tant que cheffe d’une équipe dédiée à l’axe cerveau-intestin, a obtenu le soutien de l’ERC pour son projet « GutSense » portant sur les mécanismes cellulaires et moléculaires contrôlant la communication entre le cerveau et l’intestin.
L’axe cerveau-intestin est apparu comme un acteur clé de la régulation de certains aspects de la physiologie humaine en affectant directement les réserves d’énergie. Néanmoins, en raison de l’étonnante complexité anatomique des circuits neuronaux sous-jacents, une compréhension approfondie cet axe fait encore défaut. En utilisant un modèle de mouche drosophile, plus simple mais fonctionnellement comparable, comme système modèle, les travaux de Dafni Hadjieconoumou ont montré que les neurones entériques adultes sont fonctionnellement plastiques. Il s’agit d’une caractéristique physiologique très importante pour l’ajustement de la prise alimentaire par l’animal afin de répondre aux besoins énergétiques. Le projet soutenu par l’ERC permettra l’étude de l’impact des facteurs environnementaux, tels que les habitudes alimentaires ou les niveaux d’activité physique, sur la fonction de l’axe cerveau-intestin.
Sources
https://institutducerveau-icm.org/fr/team/equipe-genetique-et-phisiopat…
https://institutducerveau-icm.org/fr/team/equipe-genetique-et-phisiopat…
https://uk.linkedin.com/in/dafni-hadjieconomou-954ba2220