Aller au contenu principal

Soit 34,00 après déduction fiscale de 66%

Je fais un don mensuel Je fais un don IFI
Recherche, Science & Santé

Maladie de Huntington : des anomalies cérébrales détectables dès le stade embryonnaire

Publié le : 17/07/2020 Temps de lecture : 1 min
image

La maladie de Huntington est une maladie neurologique génétique qui apparaît généralement à l’âge adulte. Des équipes de chercheurs et de cliniciens au Grenoble Institut des neurosciences (Inserm/ Université Grenoble Alpes) et à l’Institut du cerveau (Inserm/Sorbonne Université/CNRS/AP-HP) ont découvert des anomalies cérébrales dans des cerveaux d’embryons humains porteurs de la mutation responsable de la maladie de Huntington. Ces travaux à paraître dans Science interrogent sur les mécanismes de progression silencieuse de la maladie et sur le moment et la façon de traiter les patients dans le futur.

La maladie de Huntington est une maladie génétique du système nerveux central, rare et héréditaire. Elle se manifeste habituellement entre les âges de 30 et 50 ans par des troubles psychiatriques, cognitifs et moteurs qui s’aggravent progressivement. Elle est due à la mutation du gène codant pour une protéine nommée huntingtine et se transmet sur un mode dit « autosomique dominant » : hériter d’une seule copie pathologique est suffisant pour développer la maladie. En France, environ 18 000 personnes sont concernées : 6 000 présentent déjà des symptômes et près de 12 000 présentent le gène porteur de la mutation mais asymptomatiques.

 

Les équipes de Sandrine Humbert, directrice de recherche Inserm au Grenoble Institut des Neurosciences(Inserm/Université Grenoble Alpes) et Alexandra Durr, Professeur des Universités – Praticien Hospitalier à Sorbonne Université, à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, AP-HP et à l’Institut du cerveau (Inserm/Sorbonne Université/CNRS/AP-HP), s’intéressent aux stades précoces de la maladie de Huntington et à la longue période qui précède l’apparition des symptômes. Dans de nouveaux travaux publiés dans Science, elles se sont penchées sur le moment auquel pourraient survenir les anomalies cérébrales.

 

Les équipes de recherche ont étudié des cerveaux d’embryons humains de 13 semaines, issus de dons des parents suite à une interruption médicale de grossesse. Elles ont observé plusieurs différences entre des embryons porteurs de la mutation du gène codant pour la huntingtine et d’autres non porteurs.

Chez les premiers, la protéine huntingtine pathologique est anormalement localisée dans les cellules progénitrices à l’origine des neurones du cortex. Cette localisation anormale est associée, entre autres, à des problèmes de localisation de protéines de jonction dans ces cellules et à des altérations de la taille, densité et orientation du cil, un organelle essentiel au fonctionnement de ces cellules. Ces anomalies perturbent l’équilibre « division-différentiation » des cellules progénitrices. Celles-ci sont en effet issues d’un réservoir de cellules en division dont une partie se différencie en neurones tandis que l’autre continue de se diviser pour fournir de nouvelles cellules progénitrices. Chez les embryons porteurs de la mutation, ces cellules progénitrices entrent plus vite en différenciation au dépend du réservoir de cellules en division.  

 

Les chercheurs ont renouvelé l’expérience avec un modèle de souris de la maladie de Huntington à un stade équivalent de développement embryonnaire et ont retrouvé les mêmes anomalies. Ce travail leur a ainsi permis de valider ce modèle animal pour poursuivre l’exploration des mécanismes précoces de la maladie à d’autres stades du développement embryonnaire ou après la naissance.

Coupe de cerveau humain (cortex). A gauche, les noyaux sont marqués en bleu; à droite, les cellules progénitrices en magenta sont moins engagées dans la différentiation neuronale que celles en vert. © Monia Barnat/Grenoble Institut des Neurosciences/Inserm, Université Grenoble Alpes
Etude des cerveaux d'embryons

« C’est la première fois que des anomalies du développement cérébral sont mises en évidence dans cette maladie. De plus, celles-ci sont relativement importantes et étendues bien que nous ne soyons pas encore capables de déterminer leurs conséquences directes »

Mais pourquoi les porteurs de la mutation ne manifestent-ils alors aucun symptôme avant un âge avancé ? « À ce stade, nous posons l’hypothèse que le cerveau met très tôt en place des mécanismes de compensation qui permettent un fonctionnement normal. Il se pourrait d’ailleurs qu’il en soit de même chez les personnes porteuses de mutations associées à d’autres types de dégénérescence comme la maladie d’Alzheimer ou la sclérose latérale amyotrophique », précisent les chercheuses.

Sandrine Humbert et Alexandra Durr Directrices des travaux

Celles-ci vont maintenant poursuivre la description du développement cérébral chez des souris modèles de la maladie de Huntington, tenter de comprendre comment ces défauts précoces contribuent à la pathologie adulte, et comment la compensation de ces derniers pourrait être régulée pendant toute la période silencieuse sans symptômes. « Cette découverte a en outre des conséquences importantes sur la façon et le stade auxquels les traitements qui modifient le cours de la maladie doivent désormais être envisagés », concluent-elles.

Sandrine Humbert et Alexandra Durr

Sources

https://science.sciencemag.org/content/early/2020/07/15/science.aax3338

Imagerie cérébrale équipe Durr
Equipe
Neurogénétique fondamentale et translationnelle

L’équipe "Neurogénétique fondamentale et translationnelle" s’intéresse à des maladies neurogénétiques, les dégénérescences spinocérébelleuses- DSC (les paraplégies spastiques et les ataxies cérébelleuses), les démences frontotemporales (DFT) et la

En savoir plus

D'autres actualités qui pourraient vous intéresser

Interneurones. Crédit : UCLA Broad Stem Cell Research Center.
Cibler les interneurones inhibiteurs du striatum pour stopper les comportements compulsifs
Et si on pouvait résister aux compulsions ? Ces comportements irrationnels, que l’on observe notamment dans les troubles obsessionnels compulsifs (TOC), sont très difficiles à réfréner. Pourtant, à l’Institut du Cerveau, l’équipe d’Éric Burguière ...
09.09.2024 Recherche, Science & Santé
Les nerfs moteurs présents dans la moelle épinière se projettent vers la périphérie, où ils entrent en contact avec les muscles, formant des connexions appelées jonctions neuromusculaires. Crédit : James N. Sleigh.
Maladie de Charcot : les effets inattendus des ultrasons
Depuis une quinzaine d’années, les neurochirurgiens perfectionnent une technique fascinante : ouvrir temporairement la barrière hémato-encéphalique via des ultrasons, pour faciliter l’action de molécules thérapeutiques dans le système nerveux central ...
30.08.2024 Recherche, Science & Santé
Un neurone
Syndrome de Rett : une nouvelle thérapie génique en vue
La thérapie génique pourrait constituer notre meilleure chance de traiter le syndrome de Rett, un trouble neurologique qui entraîne des déficiences intellectuelles et motrices graves. À l’Institut du Cerveau, Françoise Piguet et ses collègues ont ...
11.07.2024 Recherche, Science & Santé
Lésions d’un patient à l’inclusion dans le protocole (M0) disparues après 2 ans de traitement à la Leriglitazone (M24)
Le double effet de la leriglitazone dans l'adrénoleucodystrophie liée au chromosome X (ALD-X)
En 2023, l’équipe du Professeur Fanny Mochel (AP-HP, Sorbonne Université), chercheuse à l’Institut du Cerveau montrait que la prise quotidienne de leriglitazone permettait de réduire la progression de la myélopathie des patients atteints d ...
24.06.2024 Recherche, Science & Santé
Une tête de statue de l'île de Pâques sur laquelle sont posées des éléctrodes
Un meilleur pronostic de retour à la conscience des patients placés en réanimation
Lorsqu’un patient est admis en réanimation à cause d’un trouble de la conscience — un coma par exemple — établir son pronostic neurologique est une étape cruciale et souvent difficile. Pour réduire l’incertitude qui prélude à la décision médicale, un ...
04.06.2024 Recherche, Science & Santé
Population de bactéries commensales (en rouge) dans un intestin grêle de souris. Crédit : University of Chicago
La composition du microbiote intestinal pourrait influencer nos prises de décision
La façon dont nous prenons des décisions dans un contexte social peut être expliquée par des facteurs psychologiques, sociaux, et politiques. Et si d’autres forces étaient à l’œuvre ? Hilke Plassmann et ses collègues de l’Institut du Cerveau et de l ...
16.05.2024 Recherche, Science & Santé
Voir toutes nos actualités