Dafni Hadjieconomou a rejoint l’Institut du Cerveau en septembre 2023. Ses recherches porteront sur l’axe « cerveau-intestin » dans le but d’identifier les mécanismes fondamentaux conservés au cours de l’évolution par lesquels les neurones intestinaux régulent le métabolisme.
Quel est votre parcours ?
Je suis d’origine chypriote grecque. J’ai grandi à la fois en Grèce et à Chypre. J’ai toujours été intéressée par la découverte : quand j’étais enfant, je voulais devenir archéologue.
En grandissant, j’ai commencé à m’intéresser à la biologie et à la génétique. Comme il n’y avait pas de diplôme de recherche dans ce domaine en Grèce, je m’étais faite à l’idée de rejoindre une université aux États-Unis. Mais l’année où j’ai passé mes examens de fin d’études, un tel diplôme a été créé en Grèce. Je suis donc restée pour entreprendre une licence en biologie moléculaire et en génétique. Au cours de ma dernière année, j’ai eu un véritable coup de foudre pour les neurosciences. Pour moi, c’était vraiment passionnant d’en découvrir davantage sur cette boîte noire qu’est le cerveau…
J’ai par la suite emménagé à Londres pour suivre un master en neurosciences cliniques. Pour mon doctorat, j’ai choisi la biologie du développement, avec un focus sur l’étude du système nerveux par l’utilisation d’un modèle de type « mouches ». J’ai ainsi pu m’intéresser aux mouches et à leur génétique, puis, à la fin de mes années de doctorat, j’ai commencé à m’intéresser davantage au fonctionnement du système nerveux chez l’animal adulte et à son rôle dans la régulation de la physiologie. J’ai rejoint un laboratoire de l’Imperial College de Londres pour étudier le système nerveux entérique, c’est-à-dire la partie du système nerveux qui innerve notre intestin. C’est un sujet fascinant !
Vers la fin de mon post-doc, j’ai répondu à l’appel à candidatures pour un poste de cheffe d’équipe à l’Institut du Cerveau, et je suis très heureuse d’être ici aujourd’hui !
Pourquoi avoir postulé à l'Institut du Cerveau ?
J’étais très enthousiaste à l’idée de rejoindre l’environnement original de l’Institut, d’appréhender les différents types de questions qui y sont abordées et de profiter de son expertise… J’ai pu me rendre compte à quel point de nombreuses synergies entre la recherche fondamentale et la recherche clinique qui sont soutenues et priorisées à l’Institut du Cerveau existent, et c’est très impressionnant !
Le fait que des scientifiques de renommée mondiale s’intéressent à l’exploration de différentes questions neuroscientifiques et cela sous différents angles est également très stimulant.
Sur quoi portera vos travaux ?
Je m’intéresse à la manière dont les défis environnementaux sont calculés par l’axe intestin-cerveau et sur l’importance de ce calcul pour la régulation de notre métabolisme.
Nous commencerons par étudier les mouches en tant qu’organisme modèle. Il s’agit en effet d’un modèle très puissant pour les études génétiques, mais aussi pour l’étude des comportements et les expériences. Il s’agit surtout de l’un des rares systèmes expérimentaux chez un animal vivant où l’on peut vraiment étudier l’impact d’un seul gène dans un seul neurone à un moment donné de la vie de l’animal.
Les deux aspects opposés des conditions physiologiques (en termes d’équilibre métabolique) avec lesquels nous commencerons sont les suivants :
- Un régime nocif, c’est-à-dire un régime riche en sucre très bien établi pour induire l’obésité chez les mouches;
- De l’autre côté du spectre, un régime sain basé sur un modèle d’activité physique plus élevée, en tant qu’indicateur de l’exercice.
Il existe déjà des modèles d’activité physique pour les mouches, mais l’innovation que nous proposons consiste à essayer de voir comment les neurones de l’intestin détectent cette activité. D’un côté, nous avons le régime riche en sucre qui s’accompagne de toutes les conséquences délétères liées, notamment, à l’obésité (cancer, durée de vie plus courte, stress métabolique…) et de l’autre, nous avons les bienfaits de l’exercice. La grande question à laquelle nous tentons de répondre est de savoir si les neurones intestinaux sont impliqués. Cet aspect n’a jamais été exploré chez aucune espèce.