Des travaux de chercheurs de l’Institut du Cerveau – ICM publiés ce mois-ci dans le journal Autophagy identifient les étapes précoces d’un mécanisme qui pourrait être responsable de la mort neuronale dans la maladie de Parkinson.
La maladie de Parkinson est une affection neurodégénérative chronique à évolution lente. Cette maladie est liée à la disparition progressive des neurones de la substance noire, petite structure située à la base du cerveau. Ces neurones, appelés dopaminergiques, produisent une molécule chargée de transmettre l’information entre les neurones, la dopamine, neurotransmetteur indispensable au contrôle des mouvements du corps.
D’origine majoritairement inconnue, dans 10% des cas la maladie est due à une mutation génétique. Le dysfonctionnement des mitochondries, petites structures ou organites intracellulaires, est depuis très longtemps soupçonné de jouer un rôle dans la pathogenèse de la maladie de Parkinson, mais les mécanismes sous-jacents sont en grande partie inconnus. On sait que la mitochondrie est l’usine énergétique de la cellule ; ainsi, le bon fonctionnement et la survie cellulaire passent entre autres par la dégradation des mitochondries dont la fonction est altérée. Ce « nettoyage » est notamment assuré par les protéines codées par les gènes PINK1 et PARK2/PARKIN, dont des mutations ont été identifiées chez des personnes atteintes de la maladie de Parkinson.
A l’Institut du Cerveau – ICM, Olga Corti et son équipe dans le groupe d’Alexis Brice ont apporté une nouvelle contribution à la compréhension des mécanismes moléculaires en jeu dans la dégradation neuroprotectrice des mitochondries dysfonctionnelles. En effet, l’étude publiée par cette équipe vient éclairer les étapes précoces qui interviennent dans cette dégradation. Les chercheurs ont montré que le couple PINK1-PARK2/PARKIN, précédemment qualifié de senseur de l’état de santé de la mitochondrie, mesure en fait le degré d’efficacité des mécanismes d’import de protéines dans cet organite. En effet, la très grande majorité des protéines qui assurent le fonctionnement de la mitochondrie, dont la protéine PINK1, sont produites à l’extérieur dans la cellule et doivent donc être transportées dans l’organite. Ce processus primordial est réalisé grâce à un complexe protéique à la surface de l’organite, la machinerie « TOMM » (translocase of outer mitochondrial membrane). Il était connu que l’interaction entre PINK1 et PARK2/PARKIN conduisait à la dégradation de mitochondries endommagées. Aujourd’hui, l’équipe d’Olga Corti vient de mettre en lumière le rôle clé de la machinerie d’import « TOMM » dans ce processus. Lorsque l’état de la mitochondrie se détériore, l’import protéique est également perturbé ; PINK1 s’accumule alors à la surface de la mitochondrie et recrute PARK2/PARKIN qui initie la dégradation du complexe « TOMM ». Cet évènement est le signal initial qui conduira rapidement à l’élimination des organites dysfonctionnels. Le complexe protéique « TOMM » joue ainsi le rôle d’interrupteur moléculaire dont la seule dégradation est nécessaire et suffisante pour initier la destruction de la mitochondrie.
L’équipe cherche maintenant à comprendre si ces résultats, obtenus dans des modèles cellulaires, sont transposables à ce qu’il se passe dans les neurones. De nouvelles recherches utilisant des cellules de patients porteurs de mutations dans les gènes PINK1 et PARK2/PARKIN permettront de confirmer ces données. De même, l’ouverture récente d’une plateforme à l’Institut du Cerveau – ICM permettant de dériver des cellules souches de patients, puis de les différencier en neurones dopaminergiques, permettra d’explorer plus spécifiquement le rôle de ces mécanismes dans la dégénérescence neuronale qui intervient au cours de la maladie de Parkinson.
Titre : La dégradation de la mitochondrie est un processus essentiel au maintien de la qualité du réseau mitochondrial et ainsi au fonctionnement de la cellule. Image illustrant le réseau mitochondrial (en vert) dans une cellule. Les mitochondries endommagées sont séquestrées dans des vésicules (en jaune) qui prennent en charge leur dégradation.
Crédits photos : Giulia Bertolin/Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, Fondation Institut du Cerveau – ICM et Fondation de France
Sources
Bertolin G, Ferrando-Miguel R, Jacoupy M, Traver S, Grenier K, Greene AW, Dauphin A, Waharte F, Bayot A, Salamero J, et al. The TOMM machinery is a molecular switch in PINK1 and PARK2/PARKIN-dependent mitochondrial clearance. Autophagy 2013; 9:1801 – 1817; PMID: 24149440; http://dx.doi.org/10.4161/auto.25884