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Recherche, Science & Santé

Journée mondiale contre le cancer : vers une thérapie plus ciblée des tumeurs cérébrales

Publié le : 31/10/2014 Temps de lecture : 1 min
Un cerveau à travers une IRM

Aujourd’hui en France, près de 5000 nouvelles personnes porteuses d’une tumeur primitive maligne du cerveau sont diagnostiquées chaque année. Les symptômes dépendent de la localisation de la tumeur, de sa taille et de sa vitesse de croissance. Les gliomes représentent environ 50 % à 60 % de toutes les tumeurs primitives malignes. A l’inverse, les méningiomes sont des tumeurs bénignes fréquentes.

 

Les tumeurs cérébrales from Institut du Cerveau on Vimeo.

Les tumeurs cérébrales (gliomes, médulloblastomes qui dérivent de cellules embryonnaires, et épendymomes) sont la 2ème cause de cancer chez l’enfant.

A l’heure actuelle, les traitements des tumeurs cérébrales associent suivant les cas la chirurgie, la radiothérapie ou la chimiothérapie, mais souvent ne permettent pas la guérison.

La recherche tant clinique que fondamentale développe des moyens et des outils pour identifier les différents types de tumeurs et mettre en place le traitement le plus efficace possible selon le type de tumeur. A l’Institut du Cerveau - ICM, deux équipes de recherche travaillent tout particulièrement sur ces deux aspects.

Un cerveau à travers une IRM
Cabanis, Emmanuel-Alain / Coupe sagittale du cerveau humain. © Institut du Cerveau

Les progrès de la science nous ont permis de développer nos connaissances sur le cerveau et de mieux appréhender son fonctionnement. Nous savons que le cerveau est constitué de 100 milliards de neurones et dix fois plus de cellules gliales. Les neurones ont pour rôle de créer et conduire l’influx nerveux ; les cellules gliales quant à elles ont une fonction support importante et multiple (isolant électrique par formation de la gaine de myéline, soutien nutritionnel, protection face aux agressions, aide à la transmission de l’influx nerveux). On parle de tumeur lorsqu’il y a prolifération anormale d’une cellule qui entraine la formation d’une masse cellulaire.

 

Qu’est qu’une tumeur cérébrale ?

Aujourd’hui, on connait imparfaitement les raisons qui font qu’une cellule continue de se multiplier et devient une tumeur au lieu de disparaître conformément à « son cycle de vie ». Une tumeur cérébrale peut se développer à partir de n’importe quelle zone du cerveau : les hémisphères, le cervelet, le tronc cérébral et l’hypophyse.

Il faut distinguer les tumeurs cérébrales dites primitives qui prennent naissance directement dans le cerveau, des tumeurs métastatiques ou secondaires dont la tumeur primitive se développe dans le poumon, le colon, le sein, ou la peau. Les cellules vont ensuite se loger dans le cerveau.

Il existe une très grande variété de tumeurs cérébrales primitives. Les plus fréquentes sont les gliomes et les méningiomes. Les tumeurs malignes sont des tumeurs qui se développent rapidement entraînant la destruction de la région du cerveau dans laquelle elles se trouvent tandis que les tumeurs bégnines dites de bas grade évoluent plus lentement sans entrainer de destruction.

Les tumeurs primitives les plus fréquentes sont les gliomes, issues des cellules gliales (astrocytomes et oligodendrogliomes). Les tumeurs de bas grade sont peu agressives mais dans la plupart des cas elles évoluent vers une forme plus maligne, dite de haut grade.

Les tumeurs qui se développent à partir des méninges appelées les méningiomes sont très fréquentes et le plus souvent benignes. On trouve également les lymphomes, issues des cellules du système immunitaire cérébral, les épendymomes (tumeurs qui dérivent de la paroi des ventricules cérébraux). Les neurinomes ou schwannomes proviennent des cellules de Schwann (cellules gliales responsables de la formation de la gaine de myéline autour de l’axone). Enfin, on observe également les adénomes qui eux se développent à partir de l’hypophyse.

 

Belin, Marie-Françoise_Gliome, tumeur du système nerveux central © Institut du Cerveau
Belin, Marie-Françoise_Gliome, tumeur du système nerveux central © Institut du Cerveau

Quelles sont les avancées réalisées dans la recherche sur les tumeurs cérébrales ?

Aujourd’hui, il faut distinguer deux types de recherches qui présentent des objectifs différents, même si dans la réalité elles sont étroitement liées. Grâce à la recherche fondamentale ou encore appelée translationnelle, on arrive àmieux comprendre comment se développent les tumeurs et à identifier leurs causes. Ces dernières années, l’approche génomique à haut débit a permis à la recherche de faire de grandes avancées dans ce domaine. On peut désormais séquencer la totalité des gènes et donc identifier des altérations moléculaires et génétiques responsables de la formation des tumeurs cérébrales. Les chercheurs savent davantage appréhender les propriétés des cellules cancéreuses de type souche, responsables de la prolifération tumorale. Ils ont particulièrement étudié les cellules cancéreuses issues de glioblastomes afin de mieux identifier les gènes qui sont activés et aussi les mécanismes dits épigénétiques qui contrôlent cette activation. Il a été montré qu’un groupe de gènes (des facteurs de transcription), qui sont normalement utilisés par les cellules souches au cours de la formation du cerveau, sont requis pour l’activité des cellules souches cancéreuses. Ainsi, on s‘est aperçu que la tumeur utilisait des gènes impliqués dans le développement normal du cerveau, pour sa croissance.

Quant à la recherche clinique, elle vise à proposer de nouveaux traitements aux patients soit pour déterminer la dose adéquate et observer la tolérance du patient vis-à-vis d’un nouveau traitement (phase I), soit à un stade plus avancé pour vérifier l’efficacité thérapeutique (Phase II et III). En outre, depuis déjà quelques années, des techniques puissantes de séquençage ont permis de mieux caractériser les altérations génétiques de gliomes, et notamment des glioblastomes. Pour les oligodendrogliomes, ces dernières années ont vu apparaître l’identification de mutations récurrentes dans ces tumeurs, comme les mutations IDH1, CIC et FUBP1. Les chercheurs ont pu mettre en évidence des groupes d’impact prédictifs et pronostiques différents. Les mutations IDH1 ont permis de définir un sous-groupe de gliomes de pronostic plus favorable.

 

Les équipes de recherche

A l’Institut du Cerveau, deux équipes de recherche sont mobilisées autour de la lutte contre les tumeurs cérébrales en lien avec les neurologues, neurochirurgiens du Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière. L’équipe dirigée par le Pr. Marc Sanson travaille plus particulièrement sur la biologie moléculaire et les mutations génétiques en cause dans l’apparition des tumeurs : oligodendrogliomes, gliomes de bas grade, gliomes du tronc cérébral notamment, et méningiomes grâce à l’arrivée du Pr Michel Kalamarides, neurochirurgien. Elle cherche à identifier des biomarqueurs utiles en clinique, d’intérêt diagnostique, pronostique mais surtout des altérations qui pourraient relever d’un traitement ciblé, spécifique. Au sein de cette équipe, le groupe GlioTex dirigé par le Dr. Ahmed Idbaih, dérive des cultures de cellules souches de glioblastomes afin de tester des thérapies ciblées.

Emmanuelle Huillard et son équipe, créée en 2012 et lauréate de l’Appel d’offre ATIP/Avenir (Inserm et CNRS), s’intéresse à la compréhension des mécanismes moléculaires et cellulaires intervenant au cours du développement des gliomes et en particulier comment des gènes du développement normal sont « piratés » par les cellules tumorales. Actuellement, les équipes collaborent sur un projet visant à développer un modèle d’oligodendrogliome en combinant des mutations des gènes les plus fréquemment retrouvées dans ces tumeurs : IDH1 et CIC.

 

Guichet, Pierre-Olivier / Glioblastome © Institut du Cerveau
Guichet, Pierre-Olivier / Glioblastome © Institut du Cerveau

Quelles sont les attentes thérapeutiques ?

Aujourd’hui, il est encore difficile de détecter une tumeur cérébrale avant que celle-ci ne soit visible à l’IRM (technique d’imagerie par résonnance magnétique). Néanmoins, la recherche de biomarqueurs constitue une stratégie pour diagnostiquer les tumeurs et donc de développer des moyens de diagnostic précoce. Les biomarqueurs sont des molécules présentes dans le sang, les urines ou le liquide céphalo-rachidien (LCR), qui témoignent de la présence de la tumeur dans le cerveau. Identifier les biomarqueurs pourrait permettre d’établir directement le diagnostic de la tumeur et pouvoir la traiter de manière efficace. Afin de déterminer l’évolution de la tumeur et sa réponse au traitement, on utilise des méthodes de biologie moléculaire et d’immunohistochimie sur des gènes dits marqueurs pronostiques (de l’évolution de la tumeur) ou prédictifs (de la réponse au traitement). Ainsi, dans les oligodendrogliomes, lors du diagnostic, on recherche la présence d’une altération chromosomique soit la co-déletion des régions chromosomiques 1p et 19q. Cette altération est associée à un meilleur pronostic et une meilleure réponse au traitement. Enfin, la mutation du gène IDH1 est un important facteur de pronostic pour les gliomes.

Aujourd’hui il n’existe pas de traitements qui permettent la guérison des tumeurs. La recherche clinique s’attache d’une part à améliorer les traitements dits classiques avec pour exemple le recours à la chirurgie éveillée pour traiter les tumeurs de bas grade, mais aussi une meilleure utilisation de la radiothérapie et chimiothérapie, dans le but d’améliorer l’efficacité, minimiser les effets secondaires et de préserver la qualité de vie des patients.

D’autre part, les nouveaux espoirs se tournent vers la thérapie ciblée. Les caractérisations génétiques et moléculaires des types et sous-types des tumeurs permettent de mettre en place une véritable thérapie personnalisée. Certaines de ces altérations même rares, si elles sont hautement oncogéniques constituent des cibles attractives : ainsi la forme mutante du récepteur EGFRvIII, et surtout le gène de fusion FGFR3-TACC3 ou l’enzyme mutante IDH1, que l’on peut neutraliser par des molécules spécifiques suscitent beaucoup d’espoir.

 

Les questions


Qu’est l’ONCONEUROTEK ?
« Il s’agit d’un centre de ressources biologiques spécialisé dans les échantillons provenant de patients atteints de tumeurs cérébrales, créé en 1996 par le Pr Delattre. C’est la plus importante biobanque de tumeurs cérébrales qui existe en Europe, avec environ 10 000 patients inclus. »

Pourquoi l’utilité de cette plateforme ?
« Nous possédons un panel d’échantillons de tumeurs cérébrales qui se veut le plus représentatif possible pour à la fois étudier ce qu’il se passe dans la tumeur mais aussi étudier l’environnement de la tumeur, (par exemple, les modifications engendrées au niveau de la circulation sanguine, au niveau de ses marqueurs biologiques), et ce dans le but de trouver un marqueur biologique qui soit prédictif d’une réponse à un traitement ou encore prédictif de l’évolution de la tumeur. De plus, nous effectuons des recherches de caractérisation des différents types et sous-types de tumeurs, afin de connaître au niveau génomique les altérations présentes. »

Comment travaillez-vous en lien avec les unités de recherche de l’Institut du Cerveau ?
« Le fait d’être implanté au sein de l’hôpital Pitié-Salpêtrière nous apporte un immense bénéfice car nous travaillons en lien avec les services de neurologie, de neurochirurgie et celui qui est le plus important pour nous est le service d’anatomopathologie. Bien entendu, nous travaillons en lien très étroit avec les équipes du Pr Marc Sanson, et d’Emmanuelle Huillard ; nous fournissons aussi des échantillons biologiques à d’autres équipes de recherche de l’Institut du Cerveau - ICM qui expriment un besoin dans le cadre de leurs recherches (Eric Le Guern et Stéphanie Baulac qui travaillent sur l’épilepsie). »

Comment envisagez-vous l’avenir de la tumorothèque ?
« Nous avons nettement progressé depuis notre création en 1996. Récemment, nous avons obtenu une certification française NFS96-900 et cela grâce à Amithys Rahimian, responsable tumorothèque et qualité. Elle nous a permis d’homogénéiser nos façons de travailler. Nous hébergeons les échantillons de 2 centres de référence nationaux qui s’intéressent aux oligodendriomes anaplasiques et aux lymphomes cérébraux primitifs. Pour l’avenir, nous souhaitons développer nos partenariats avec les académiques et industriels afin d’augmenter notre visibilité et d’améliorer nos processus. »

Sources : Inserm, e-cancer.fr, Institut du Cerveau
crédit photo: © JP Parienté pour Institut du Cerveau

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