Les dégénérescences fronto-temporales se manifestent essentiellement par des troubles du comportement et du langage, concomitants ou successifs. L’évolution vers une démence généralisée est plus ou moins rapide.
Les symptômes de la démence fronto temporale (DFT)
L’état du patient se dégrade au fil des années. Les symptômes de la dft sont très variables d’un patient à l’autre, dans leurs manifestations comme dans leur ordre d’apparition et leur évolution.
Dans les premières phases de la DFT, les troubles du comportement sont discrets et peuvent évoqués des effets de la fatigue, du stress ou d’une déprime.
Les premiers troubles sont souvent une fatigue mentale ou apathie, une perte de motivation, une indifférence aux émotions et aux autres même les proches, ou encore une perte d’envie.
Un second type de symptômes, plus visibles, sont les troubles du comportement comme une grande désinhibition et une incapacité à respecter des codes sociaux – réflexions inappropriées, non-respect des règles lors de la conduite ou dans l’espace public-. Il peut s’agir aussi d’une grande agitation voire de l’agressivité, de fugues ou du développement d’obsessions. Les patients peuvent agir étrangement par exemple en répétant continuellement les mêmes gestes, faire une fixation sur certaines habitudes ou objets et devenir des collectionneurs compulsifs. Certains patients peuvent avoir un besoin de bouger irrépressible, par exemple marcher plusieurs kilomètres sans but spécifique. Un manque de patience et une irritabilité excessive sont parfois observés.
Des modifications du comportement alimentaire sont également présente chez de nombreux malades comme de la gloutonnerie – manger de façon excessive et précipitée – ou des phases de boulimie ou d’anorexie.
Dans certains cas les malades peuvent se négliger eux même, avec une perte d’hygiène corporelle et vestimentaire.
Les troubles du langage dans la DFT peuvent prendre différentes formes et affecter soit la syntaxe (sens des mots) soit la fluence :
- L’aphasie est une perte de parole se manifestant par des difficultés à prononcer les mots, une perte de vocabulaire voire, à des stades plus avancés, une incapacité totale à parler. La compréhension des mots est cependant préservée.
- La démence sémantique, dans laquelle c’est au contraire la compréhension qui est affectée et non la prononciation survient lorsque la région gauche du cerveau est plus atteinte. Les patients présentent alors une incapacité à nommer les objets (aphasie anomique) ou à reconnaitre les visages des proches (prosopagnosie).
D’autres troubles apparaissent par la suite en particulier une confusion, des perturbations de jugement, de planification avec une impossibilité pour le patient de réaliser des choses simples.
Des symptômes moteurs peuvent apparaitre à un stade avancé de la maladie, comme une rigidité de mouvement ou des troubles de la marche. La DFT est d’abord suspectée grâce au témoignage des proches qui rapportent des modifications du comportement d’un parent, un changement de sa personnalité ou des difficultés de langage.
Des examens complémentaires permettent alors de confirmer le diagnostic de DFT. Tout d’abord les tests neuropsychologiques, qui permettent d’évaluer les capacités de raisonnement, de jugement, d’attention ou encore la mémoire des patients. Des examens d’imagerie cérébrale, tels que l’IRM ou le scanner, mettent en évidence une atrophie des régions frontales et temporales. Des examens biologiques, une ponction lombaire ou un électroencéphalogramme permettent d’exclure d’autres pathologies aux symptômes similaires.
Pour les formes génétiques familiales, 50% des cas environ, une consultation et une analyse génétique peuvent être proposées pour identifier la mutation à l’origine de la maladie.
À l’Institut du Cerveau
L’un des objectifs importants des recherches menées à l’Institut du Cerveau et à l’IM2A est d’améliorer le diagnostic des patients pour détecter la maladie plus précocement et limiter l’errance diagnostique. Les DFT peuvent en effet être confondu avec plusieurs maladies selon leur stade, comme des troubles de l’humeur (dépression, troubles bipolaires) ou des troubles anxieux (troubles obsessionnels compulsifs), ou encore avec la maladie d’Alzheimer.
Isabelle Le Ber et Paola Caroppo, en collaboration avec les équipes de neuroimagerie et le Centre d’Investigation clinique à l’Institut du Cerveau, ont identifié grâce à des techniques de pointe d’imagerie cérébrale, une région très limitée du cerveau, impliquée dans la compréhension du langage, dans la capacité à interagir avec autrui et à reconnaître les émotions faciales (altérées chez les patients atteints de DFT), qui pourrait être le siège des premières lésions cérébrales dans une forme génétique de DFT. Cette découverte majeure a permis de localiser le siège des mécanismes biologiques, en particulier la mort neuronale avant même l’apparition des symptômes cliniques.
Les patients atteints de démences fronto-temporales (DFT) sont incapables de classer les objets par catégories. En étudiant des patients présentant des lésions du cortex frontal, les chercheurs de l’équipe « FRONTLAB: Fonctions et dysfonctions de systèmes frontaux » dirigée par le Dr Richard Lévy ont mis en évidence que la catégorisation au sein du cerveau met en jeu différentes fonctions, d’une part la capacité à réunir des informations et d’autre part, la capacité à l’abstraction. Ces deux mécanismes dépendent de régions spécifiques au sein des lobes frontaux. Cette étude ouvre la voie à l’utilisation de tests de formation de concept comme outil diagnostique pour les DFT.
Une étude de Marc Teichmann et Carole Azuar de l’équipe du Pr Richard LEVY, à l’Institut du Cerveau et à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière-APHP met en évidence une atteinte particulièrement marqué des émotions morales, comme l’admiration, la honte ou la pitié, chez les patients atteints de dégénérescences fronto-temporales. Les résultats ouvrent la voie à un diagnostic précoce, sensible et spécifique des patients atteints de DFT.